II. Repos sous les cocotiers

Avant que le soleil n'ait eu le temps de se coucher, Louis se leva, sentant la tête lui tourner encore. Il conclut alors qu'il devait être fatigué et décida d'aller un peu se reposer dans sa chambre, il reviendrait quand il se sentirait plus en forme. Après en avoir informé Perle et Nate, il traversa le salon afin de monter dans sa chambre où il se laissa tomber sur le lit.

"Il ne faut pas que je m'endorme, Perle risquerait de se vexer si elle venait me trouver pour me donner sa réponse à cette relation d'essai que je lui ai proposé."

Mais il était dur de lutter contre le sommeil qui vous faisait vous endormir sans que vous ne vous aperceviez. Fermant les paupières afin de se reposer les yeux, il ne se sentit pas sombrer profondément. Pourtant, Louis était loin d'être un couche-tôt mais là, il n'était pas au mieux de sa forme. Tant pis, il dérogerait à sa réputation de fêtard.

Louis dormait si bien qu'il n'entendit pas la porte de sa chambre s'ouvrir.

II. Repos sous les cocotiers - Page 2 Perle

Après avoir regardé Louis gravir les escaliers, ce fut au tour de Perle de délaisser son frère, non sans lui avoir donné un coup de main pour ranger. Dans sa chambre, la jeune fille jeta un coup d'œil vers la porte communicante.
Mais n'étant pas encore décidée, elle prit la direction de sa salle de bon et se déshabilla pour prendre une douche. Elle espérait que cela lui éclaircisse les idées.
Longtemps, l'eau s'écoula sur sa peau dorée, détendant en chemin, ses muscles noués. L'eau avait un effet relaxant sur la jeune fille et avait le don d'apaiser son esprit. Elle s'y sentait tellement bien qu'elle pouvait y passer des heures. La jeune fille se savonna ensuite avec du Tahiti douche à la noix de coco avant de se rincer interminablement. Puis sortit pour se sécher une serviette moelleuse. Un coup d'œil vers le miroir lui permit de constater qu'elle avait bien meilleure mine. C'est ainsi qu'elle décida qu'il était temps de donner sa réponse.

La jeune fille enfila un pyjama léger constitué d'un minishort et top blanc et se rendit dans la chambre du garçon. Plongée dans la nouvelle pénombre, Perle s'approcha du lit sur la pointe des pieds avant de se glisser sous les couvertures. Là, elle se colla contre le dos du jeune homme et passa un bras pour l'enlacer. Ce geste lui parut si familier et pourtant c'était la première fois qu'elle s'autorisait ce genre de geste envers lui. Et avant qu'elle ne renonce et décide de s'enfuir, sa voix douce s'éleva dans la pièce.

"Voilà qui est bien lâche de ma part de profiter de ton sommeil pour t'annoncer ma réponse mais…j'ai peur de te faire face et que tu te moques de moi. Car j'ai peur d'accepter à nouveau une relation et qu'il se passe la même chose qu'avec…qu'avec "Lui".

Ses larmes lui montèrent immédiatement mais fit un gros effort pour qu'elles ne s'écoulent pas.

"Pourtant…Pourtant ce n'est pas faute de me convaincre que tu n'es pas comme lui. C'est pourquoi, j'accepte ta proposition…et ce, sans aucune condition mis à part ne pas l'annoncer aux parents. Je ne veux plus souffrir de ces cauchemars ou de ressentir ce dégoût lorsqu'on me touche…"

Étonnamment, à cet instant, elle se sentait si bien contre lui mais ne chercha pas à approfondir ce sentiment inconnu qui naissait doucement dans son cœur et sombra à son tour dans une douce somnolence.

Louis dormait déjà comme une souche quand Perle entra dans la chambre. Il s'était écroulé sur le lit et n'avait pas pris la peine de se changer, trop fatiguant. Le jeune homme n'était pourtant pas paresseux mais il était trop épuisé pour se motiver à retirer ses vêtements un par un. Sommeillant trop profondément pour entendre les mots de sa fiancée, il n'avait pu recevoir sa réponse.

Il s'écoula plusieurs heures avant de se retourner dans son lit, faisant alors face à Perle qui l'enlaçait toujours. Sentant un contact, il entrouvrit les yeux et remarqua une silhouette assez floue. Il ne se souvenait pas y avoir invité une femme, ni n'avoir bu suffisamment pour le faire. Quand ses yeux y virent plus net, il réalisa qui se trouvait à ses côtés et sursauta tellement d'affolement qu'il en tomba du lit.

"Hein?"

Il se releva en s'asseyant sur le sol, posant ses doigts sur le rebord du lit ainsi que ses yeux, comme s'il espionnait quelque chose du haut d'un mur. Perle était là, endormie dans son lit dans une tenue si légère. Louis se mit alors à réfléchir. Si elle était là, c'était peut-être parce-qu'elle avait accepté sa proposition mais aller jusqu'à dormir avec lui sans même le prévenir... Comment espérait-elle qu'il ait envie de rester sage alors qu'elle était là, si désirable?

"Elle est vraiment imprudente..."

Mais Louis savait qu'il devrait demeurer l'homme attentionné qu'il était avec elle. Perle avait besoin de reprendre confiance en la gent masculine avec ce qu'il s'était produit avec Christopher. S'il osait quelque chose envers elle, qu'elle le consente ou pas, il ne serait pas différent de ce muffle de sportif. Le jeune homme se leva alors et couvrit davantage sa fiancée d'un fin drap qu'il avait repoussé dans sa surprise. Plus elle serait couverte, moins elle lui apparaitrait trop tentante. Il partit ensuite s'installer sur un fauteuil dans un coin de la chambre et décida d'y terminer sa nuit. S'il continuait de dormir dans le même lit que Perle et qu'il sentirait le contact de sa peau sur la sienne, il s'était si languit d'elle durant toute ses années qu'il ne répondrait plus de rien.

Enfin la lune quitta le ciel paré de ses diamants pour faire place au soleil enchanteur d'Hawaii. Et avec ça, le réveil de la nature. Les mouettes piquaient du bec pour prendre le petit déjeuné. Peu à peu, les maisonnettes s'éveillaient également. Ici, les gens se levaient tôt pour profiter de la chaleur clémente.

Mais chez les Dumas, tout le monde dormait à poing fermé. Le décalage horaire faisait son œuvre et ce ne fut qu'au alentour de 11h que Perle entrouvrit un œil. Encore somnolente, la jeune fille papillonna des yeux tout en se demandant où elle se trouvait. Elle s'assit alors et regarda autour d'elle avant de paniquer. La jeune fille avait donc passé la nuit dans la chambre de son fiancé et qui plus est, dans son lit. Elle repoussa alors les couvertures et posa les pieds à terre avant de se rendre compte que quelque chose clochait.

Perle jeta un coup d'œil autour d'elle et vit le jeune homme dans un coin de la pièce. Ayant installé un lit de fortune dans un fauteuil, elle se sentit coupable de l'avoir ainsi éjecté.

"Mon dieu, qu'a-t-il du penser…"

Mais malgré elle, ses pieds la dirigèrent vers son fiancé et profitant de son sommeil, elle l'examina. Elle devait reconnaître qu'il était assez séduisant quand il dormait. Sa bouche semblait délicate et ne proférait plus une seule idiotie. Quant à son visage, il avait une expression de douceur. Rien de ce qu'il ne dégageait habituellement, en somme.

"Désolé…"

Les lèvres de Perle effleurèrent le front de Louis avant qu'elle prenne la direction de sa salle de bain pour prendre une douche. Et quand ce fut fait, elle passa un bikini sur lequel elle enfila un short en coton noir et un débardeur de la même couleur. Ses cheveux furent attachés en un chignon par lequel s'échappaient quelques mèches mais qui révélait une nuque tentatrice. Une fois prête, elle descendit préparer le petit déjeuné.

Réveillé par le cri d'une mouette, Louis ouvrit les yeux avec difficulté. Il remarqua alors que Perle s'était déjà levée et vu l'heure qu'il était, elle aurait quand même pu le réveiller. Il n'était pas vraiment attaché au fait d'être réglé comme les gens ordinaires car il menait une vie plutôt désordonnée à Los Angeles mais quand on est en vacances, on est quand même sensé prendre ses repas ensemble.

"Bon, je prends note : le fauteuil n'est pas l'endroit le plus approprié pour le sommeil."

En effet, Louis se sentait un peu engourdi. Quand il dormait, il était plutôt du genre à s'étaler, alors un espace si réduit lui donnait l'impression d'avoir passé la nuit dans une boîte de sardine. En se levant, il s'étira à en faire craquer quelques articulations et entreprit d'aller se doucher avant de descendre prendre son petit-déjeuner. L'eau tiède lui fit le plus grand bien et il resta sous la douche plus longtemps que d'ordinaire.

S'habillant d'un long short de bain de couleur chocolat avec des motifs beige et d'un T-shirt à rayures horizontales inégales blanches, noires et marrons, il sortit de la salle de bain les cheveux encore humides et rejoignit le rez-de-chaussée pour savourer le petit-déjeuner dont l'odeur lui chatouillait les narines.

Dans la cuisine, Perle avait d'abord allumé la radio pour se mettre en condition. Une musique rock envahit alors la pièce. Motivée, elle sortit du frigo ce qu'il fallait pour la préparation de pancakes avant de remplir le percolateur d'eau et de préparer le café. Comme à l'ancienne, la jeune fille adorait moudre les grains de café avant de le faire passer. Elle trouvait que l'arôme y était plus agréable pour les papilles et une bonne odeur de café emplissait la cuisine.

Puis, tout en préparant la pâte, la jeune fille chantonnait ce qu'elle entendait. De bonne humeur, elle attendait que l'horoscope lui annonce ce qui l'attendait aujourd'hui. Apposant le film alimentaire sur le récipient pour laisser reposer sa préparation, la jeune fille entreprit de mettre la table. Assiettes, couverts, serviettes, verres, tasses. Tout y passa.
Ensuite passèrent les garnitures. Elle sortit des placards, le sirop d'érable, la confiture et le sucre ainsi que du frigo, le beurre. Pour ceux qui le désiraient, quelques fruits tels que des fraises, groseilles, bananes, avaient été sorti pour les accompagner.

Personnellement, elle raffolait du sirop d'érable, mais elle savait que son frère adorait mélanger les saveurs.

Vint alors le moment de les cuire. Mais avant tout chose, elle alla vers l'interphone situé près de la porte menant au couloir et sonna chez son frère pour qu'il vienne prendre le petit déjeuné. C'est d'une voix ensommeillée qu'il répondit. Elle fit de même chez Louis mais n'obtint aucune réponse. Haussant alors les épaules, elle retourna à sa poêle et commença.

Cinq minutes plus tard, elle entendit des pas dans la pièce et sans se retourner, croyant que c'était son frère, elle tendit la main vers les fruits.

"Nate ? Pourrais-tu laver quelques fruits ? Je ne sais pas si Louis aime en prendre alors prévois en assez…"

En arrivant dans la salle à manger, pièce voisine de la cuisine, Louis remarqua que c'était Perle qui préparait le petit-déjeuner. Il aurait plutôt parié sur Nate. De plus, entendant des pas dans les escaliers, elle avait d'ailleurs supposé que c'était son frère. Elle ne s'attendait donc pas à la présence de Louis.

"J'aime tous les fruits, sauf les fruits rouges. Trop doux, burk."

Mais plutôt que de s'occuper des fruits, il saisit instantanément la main qu'elle tendait, la prenant par surprise. Puis s'approchant très près d'elle, il la fixait dans les yeux en souriant. Une pointe de son sourire se voulait triomphant.

"A en voir l'endroit où tu te trouvais quand je me suis réveillé au milieu de la nuit, je présume que tu as accepté mon offre, n'est-ce pas?"

Louis approcha davantage son visage de celui de Perle et sa voix ne devint qu'un murmure suave et hypnotisant.

"Aurais-je alors droit à mon baiser du matin?"

Enserrant sa fiancée par la taille, il n'avait pas l'intention de la laisser s'échapper maintenant qu'il parvenait enfin à pouvoir poser ses doigts sur sa peau délicate.

C'est avec surprise qu'elle entendit la voix de Louis et plus encore de sentir sa main attraper la sienne. Mais sa surprise disparut instantanément lorsqu'elle remarqua le sourire triomphant sur le visage de son fiancé. Cela lui fit regretter sa décision.

"Simple erreur de calcul. Je me suis simplement endormie. Et ton lit était là…"

Cela n'était plus possible. Elle devait faire marche arrière. Comment aurait-elle pu sortir avec cet être suffisant ? Mais elle remarqua bien que cela ne prendrait pas. Elle avait commis une erreur et Louis entendait bien faire valoir ses droits de petit ami. Mais alors qu'elle allait détourner ses yeux, il s'approcha davantage tout en l'enlaçant. Son regard chocolat se fit envoûtant. Plus foncé, plus profond, on avait l'impression de plonger dans l'abîme. Et lorsque les doigts du jeune homme effleurèrent le bas de son dos, elle fut prise de frissons inexpliqués.

Perle fit un effort pour se ressaisir en sentant une odeur de pancake brûlé. Indifférente, elle l'embrassa sur la joue comme elle le faisait avec sa famille le matin venu.

"Tu devras te contenter de cela puisque tu n'as pas entendu ma réponse…Et si tu ne veux pas que le petit déjeuné soit complètement brûlé, tu ferais mieux de me lâcher…"

Bien qu'elle n'avait qu'à tendre son autre main pour repousser la poêle, elle n'attendait qu'une chose. C'était qu'il la lâche. Mais Louis n'avait pas l'air de se décider et elle pâlit. Son regard se chargea alors d'une terreur inexpliquée. Et pour échapper au regard de son fiancé, elle ferma ses paupières. Tout cela n'allait pas recommencer. Et pourtant. La simple présence rapprochée de Louis la tétanisait.

Ayant remarqué la terreur dans le regard de Perle pendant l'espace d'une seconde et qu'elle tentait de dissimuler, Louis se sentit froissé par un tel sentiment venant de sa fiancée. Il changea de regard et la lâcha. Ses yeux avaient perdu leur douceur.

"Je n'ai pas faim de toute façon."

Louis perdait patience. Il comprenait bien que Perle ait été traumatisée par ce qui lui était arrivé avec Christopher mais le temps avait passé depuis. Il était temps qu'elle se sorte de sa torpeur et qu'elle continue enfin de prendre son existence en main.

"Je me promène sur la plage si on me cherche."

Puis il quitta la maison d'un pas décidé, sans ajouter le moindre mot. Cette crapule de Christopher ne perdait rien pour attendre de le priver indirectement ainsi de ce qui était sensé être son bonheur. Louis avait l'intention d'élaborer un plan si tordu pour le faire tomber de haut que le sportif viendrait en rampant pour implorer son pardon. Oui, Louis était très en colère.

Ses paupières se rouvrirent brusquement quand elle entendit l'aigreur dans la voix de Louis. C'est donc un sentiment de gêne qui s'empara d'elle, chassant à grand coup de balais sa peur. Une nouvelle fois, elle l'avait blessé mais comment supporter ce visage triomphant alors qu'elle aurait préféré autre chose.
Elle n'arrivait décidemment pas à le comprendre mais ne faisait rien pour non plus. Egoïstement, elle ne pensait qu'à elle et non aux sentiments que pouvaient ressentir son fiancé.

Lentement, elle se tourna vers la poêle pour la retirer et jeter le pancake complètement raté. Nate, n'étant pas encore descendu, elle prit la décision de rejoindre Louis. Après avoir pris sa décision, elle ne pouvait décemment pas le laisser broyer du noir.

*Un peu de nerf, voyons ! *

Elle sortit alors précipitamment à sa suite et le rattrapa facilement. Le dos du jeune homme était quelque peu voûté et ses mains étaient enfoncées dans ses poches. Perle n'avait jamais été insensible à la douleur d'autrui mais aujourd'hui, son cœur se serra encore plus. Ses pieds nus foulèrent le sable et elle parvint enfin à lui. Ses bras l'enlacèrent.

"Oh, Louis. Excuse moi ! Je sais très bien que j'ai tort mais comprends-moi, j'ai peur. Peur que tout ne recommence comme avec lui. Mais tu n'es pas comme lui et j'en suis consciente."

La jeune fille laissa son front aller se reposer contre le dos large de son fiancé.

"C'est pour ça que je suis venue hier pour te donner ma réponse. Oui ! Oui, j'accepte de sortir avec toi ! Mais aide moi au lieu de me repousser. Car ce n'est pas avec ton sourire suffisant que tu y arriveras."

La voix de Perle diminua de quelques décibels.

"De mon coté, j'essaierai de ne pas être prise de peur lorsque tu me toucheras…C'est tout ce que je peux faire pour l'instant…
…
Mais si cela ne te convient pas, alors repars."

Une nouvelle fois, Perle lui faisait confiance. Une nouvelle fois, il fallait qu'on la secoue pour la faire sortir de sa torpeur. Une poupée brisée qui tentait de reprendre vie. Une chose pas facile. Et si Louis refusait, elle pourrait alors dire adieu à son humanité.

Louis fut surpris que Perle la rattrape soudainement pour lui dire tout ce qu'elle pensait. En écoutant sa fiancée, il se mit à sourire et se retourna vers elle quand elle eut terminé de lui parler. Du revers de ses doigts, il caressa la joue si douce de Perle en la fixant dans les yeux de son regard envoutant.

"C'est bien mieux quand tu es honnête envers moi et je te remercie de la confiance que tu me portes. Cependant, ne crois pas aussi bien me comprendre, je suis un homme compliqué."

Voilà donc celui qui s'auto-proclamait homme compliqué, un titre qu'il s'était octroyé durant son adolescence à Los Angeles. Sa bande d'amis avaient même approuvé cette appellation. Il avait l'air d'être quelqu'un à l'esprit simple mais Louis était bien plus que ça. Rares étaient les personnes qui le connaissaient en profondeur, qui connaissaient ses envies, ses projets, la façon dont il voyait le monde réellement.

"Mais tu as tout le temps que découvrir qui est le vrai Louis Emmerson."

Louis se pencha pour embrasser Perle mais hésita au dernier moment. S'il l'embrassait, allait-elle prendre peur et le rejeter? Il n'aimait pas être en proie au doute.

Louis lui faisant face, la jeune fille faisait un effort pour ne pas fuir son regard et tenta de se comporter comme à son habitude. Lui qui se proclamait "Homme Compliqué" ne savait pas non plus à quoi s'attendre avec elle. De multiples facettes qui apparaissaient en fonction des gens qu'elle côtoyait. Une façon pour elle de se protéger.

"Je déteste devoir me montrer honnête sur ce que je ressens…En faisant ça, on peut nous atteindre…"

Les mots de Perle pouvaient paraître rempli d'amertume mais ils étaient tellement vrais. Il suffisait d'un temps soit peu d'observation et de réalisme pour voir ceux qui l'entouraient être manipulé. C'est pourquoi elle avait compris dès son plus jeune âge qu'il fallait mieux être la personne qui manipulait et non la victime. Jusqu'à aujourd'hui, cela avait toujours fonctionné. Mais elle se rendit compte qu'elle devrait s'y prendre autrement puisqu'elle n'était plus celle qu'elle était. Le reviendrait-elle ? Redeviendrait-elle la Reine du Lycée ? Elle en doutait.

Car lorsqu'elle vit Louis se pencher vers elle avec l'intention de l'embrasser, elle écarquilla ses yeux. Elle qui s'était jurée de ne jamais lui permette cela, la voilà contrainte par sa décision de tout rejeter. Hésitant, il restait à la regarder. Ainsi, il était en proie de doute.
Ce fut donc à elle de faire le premier pas.

Perle ferma les yeux et tendit ses lèvres vers celles de son fiancé. Avec timidité, elle les effleurait. Une première pour elle car elle n'était ce n'était pas son genre d'être aussi réservée.
Mais Louis compensa son baiser en l'embrassant plus passionnément. Comme si cela faisait des lustres qu'il n'attendait que cela. Et lorsqu'ils se séparèrent, la jeune fille le regardait avec étonnement.

"Oh…"

La jeune fille porta sa main délicate sur ses lèvres pour les effleurer.

*Je ne me rappelai plus qu'un baiser pouvait être aussi doux…*

Quand Perle avait posé ses lèvres sur les siennes, Louis ne put se retenir plus longtemps et rendit son baiser à sa fiancée de façon plus passionnée, plus intense. Il avait attendu tant de temps avant de pouvoir ne serait-ce qu'effleurer ses lèvres qu'il ne pouvait plus se montrer patient. Puis lorsque leur baiser se termina, la jeune fille parut assez surprise.

*Peut-être suis-je allé trop loin... Je ferais mieux de me préparer à ce qu'elle me gronde, pour ne pas changer.*

Louis observait la réaction de Perle d'un regard ardant. Il désirait encore embrasser ses lèvres, plus passionnément encore, sentir également la peau de sa fiancée sous ses doigts. Un unique baiser n'était pas suffisant pour étancher un désir qu'il avait entretenu pendant des années. Il souhaitait l'embrasser encore et encore, que Perle perçoive enfin l'intensité de ses sentiments pour elle.

"Ai-je fait quelque chose qu'il ne fallait pas?"

Guettant la réponse de sa fiancée, Louis ne regrettait pourtant pas ce baiser, qu'elle en soit en colère ou pas.

Toujours autant surprise, Perle secoua la tête de droite à gauche pour répondre à Louis. Mais comme apparemment, il pouvait se méprendre, la jeune fille prit la parole. Gênée, elle baissa les yeux pendant que le rouge montait à ses joues.

"J'avais simplement oublié qu'un baiser pouvait être aussi doux et…agréable."

Et bien qu'elle paraisse calme, à l'intérieur, ce n'était pas le cas. Elle sentait encore son estomac tressauter. Elle n'avait jamais ressenti cette sensation, même avec Christopher. Peut-être était-ce dû à quelque chose d'anormal ? Passant en revue, les garçons qu'elle avait embrassés, elle conclut que cela devait venir de son fiancé.

*Comme cela est étrange. Je me demande à quoi cela est dû.*

Sur le sable, non loin de ses orteils, passa un petit crabe. N'ayant toujours pas osé relever les yeux, elle le suivit du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse de sa vue. Incertaine, sur ce qui allait se passer, Perle ne savait pas trop comment réagir. Surtout en voyant le regard qu'avait Louis pour elle.

Réalisant que Perle n'était nullement remontée contre lui et qu'au contraire elle en était agréablement surprise, Louis se mit à sourire. Puisqu'elle n'était pas fâchée, elle ne verrait peut-être pas un inconvénient à ce qu'il l'embrasse à nouveau. Il la serra alors contre lui en la prenant par la taille. De son autre main, il caressa le visage de Perle et souleva son menton pour qu'elle remonte son regard vers lui.

"Ce peut être même encore plus agréable."

Puis il joignit ses lèvres à celles de sa fiancée en commençant par un doux baiser. Quand elle entrouvrit sa bouche, il lécha ses lèvres et unit sa langue à la sienne. Louis savait vraiment s'y prendre lorsqu'il s'agissait de baisers et pouvait en donner de toutes les sortes. Pendant qu'il embrassait Perle, ses mains caressaient la jeune fille avec prudence et douceur. Il ne devait surtout pas l'effrayer sous peine que ce moment ne s'arrête brusquement. Cette vigilance avec laquelle il devait agir donnait un peu de piquant à son action.

Ne s'attendant pas à être une nouvelle fois embrassée, Perle se retrouva une nouvelle fois contre Louis. Mais comme elle n'avait pas trouvé cela désagréable la première fois, elle lui permit de recommencer. Cette fois-ci fut bien différente du premier baiser et électrisée, elle se rapprocha plus encore, accrochant ses bras autour de la nuque pour lui caresser les cheveux.
Les mains du jeune homme allaient et venaient avec douceur sur sa peau qui s'était quelque peu dénudée en levant les bras. Elle-même y trouvait un plaisir inconnu. Rien à voir avec ce que Christopher lui avait procuré lorsque tout allait à merveille entre eux.
Ici, le plaisir était partagé et procuré par ces deux êtres. S'enhardissant, la jeune fille l'embrassa alors avec plus de passion, titillant sa langue avant de repartir sur un baiser d'une douceur extrême. Il lui était tellement agréable de l'embrasser que sa déception fut grande lorsqu'elle entendit la voix de Nate les appeler.

La jeune fille prit alors conscience de s'être laissée allée et s'écarta de Louis. Son regard allait de la maison où son frère avait certainement pu les voir à son fiancé.
Déglutissant avec peine, elle prit la parole.

"Je crois que nous ferions mieux d'aller déjeuner…non ?"

Un sourire énigmatique apparut sur les traits du jeune homme et avant qu'elle ne puisse amorcer un pas, il la prit nonchalamment par la main pour prendre le chemin du retour. Déjà attablé, Nate ne fit aucun commentaire sur leur arrivée et les servit. De bonne humeur, celui-ci affichait un petit clin d'œil envers Louis.

"Alors, vous avez passé une bonne nuit ?"

Perle plongea son nez dans ses pancakes pour cacher le rouge qui lui montait aux joues. Le souvenir d'avoir dormi avec Louis était encore bien frais dans sa mémoire. Pourtant, elle devait admettre avoir passé une nuit sans cauchemars. Une première.

"Vous avez déjà prévu ce que vous allez faire ?
-Pas vraiment et toi ?
-Hum…j'ai rendez-vous avec ma jolie voisine d'avion.
-Déjà ?
-Héhé…Mais et toi, tu ne vas pas continuer ta chasse au trésor ?"

La bouche en forme de "O", la jeune fille se remémora ce qu'elle avait entreprit bien des années auparavant. Perle avait retrouvé dans la bibliothèque de ses parents, un livre sur les légendes d'Hawaii. Et avec celui-ci une carte. Petite, elle s'était amusée à essayer de retrouver le trésor dont parlait la légende. Celle des bracelets qui promettait un amour éternel à ceux qui les échangeaient sous l'arc-en-ciel de la grotte enfouie.

Louis choisit de ne prendre que du café ce matin, le décalage horaire le barbouillait encore un peu. Puis pendant que Perle et Nate discutaient, le jeune homme en profita pour consulter ses messages sur son téléphone portable. Toujours pas signe de Chuck en vue.

*Il a encore dû passer son temps un verre dans une main et une fille dans l'autre. Il est vraiment incorrigible.*

Louis comptait son ami parmi les personnes envers lesquelles il pouvait le plus compter mais il avait l'horrible défaut de faire passer ses plaisirs avant les services qu'il rendait. Alors qu'il allait remettre son téléphone dans sa poche, celui-ci se mit à sonner d'une musique d'un film d'horreur. Il s'agissait de la musique qu'il avait attribué aux appels de sa mère.

"Ouais?
-Louis, on ne dit pas bêtement ouais quand on décroche un téléphone.
-Je m'en souviendrai. Que désire madame Cecilia?
-Et cesse donc de m'appeler ainsi, veux-tu!
-Hé, si tu m'appelles pour me crier dessus, tu n'as qu'à composer un numéro au hasard et défouler ta frustration sur quelqu'un d'autre.
-N'oublie pas que je suis ta mère, Louis!"

Louis et sa mère n'étaient pas dans les meilleurs termes depuis des années. D'autant plus que madame Emmerson était plutôt tenace et cherchait toujours à avoir le dernier mot. Son mari était plus flexible dans ses disputes avec son fils. Quand Louis raccrochait au nez de son père, ce dernier ne le rappelait pas. Tandis que sa mère, elle ne lâchait pas le morceau jusqu'à obtenir gain de cause.

"Tu ne t'es comportée en mère que quand ça t'arrangeais, histoire de faire bonne impression devant les gens. Tu n'es qu'une vile hypocrite, jamais la moindre once d'honnêteté.
-Et toi, tu es beaucoup trop honnête. Je me demande ce que j'ai raté dans ton éducation.
-Oh je t'en prie, comme si tu m'avais éduqué."

Louis se moquait éperdument de se disputer avec sa génitrice au téléphone devant sa fiancée et son frère. Il estimait que ses conflits avec elle n'avaient pas à être un secret, d'autant plus que c'était elle qui le cherchait.

"Ton père voulait te demander où tu en étais avec mademoiselle Dumas. Donnera-t-elle son accord pour t'épouser?
-Pourquoi c'est à moi que tu poses la question? Je n'en ai aucune idée moi.
-Louis, ne nous déçois pas! Nous attendons beaucoup de toi, ton père et moi.
-C'est justement ça le problème. Je n'ai pas la moindre envie que vous décidiez de mon avenir à ma place. Qu'elle m'épouse ou pas, qu'est-ce que ça peut vous faire? Ce n'est qu'une histoire de fric pour vous. Je suis certain que vous trouveriez rapidement une remplaçante à la famille richissime. Je ne suis pas votre pion.
-Je t'interdis de me parler sur ce ton, jeune homme!
-Alors tu n'as qu'à arrêter de me casser les pieds."

Sur ce, Louis raccrocha, l'irritation se lisant sur ses sourcils froncés et le regard sévère qu'il lançait au téléphone. Sa mère n'avait pas démenti son affirmation, cela signifiait qu'il avait vu juste. Si Perle refusait de l'épouser, il serait contraint de prendre quelqu'un d'autre pour épouse alors qu'il serait toujours amoureux d'elle. Qui a dit que la vie des riches était simple?

Gênée par la tournure que prenait la conversation téléphonique qu'avait Louis avec sa mère, Perle échangea un regard malheureux avec Nate. Celui-ci avait la même expression que sa sœur. Bien que le point du mariage avait été abordé sans elle, elle avait toujours entretenu de très bon rapport avec ses parents et remarquait seulement maintenant qu'elle n'avait pas toujours été la gentille fille qu'elle aurait du être. Ils lui avaient tout passé. Du plus futile au plus sérieux.

La jeune fille se leva alors de la table et commença à débarrasser. De cette manière, elle n'avait pas son attention fixée sur les propos de son fiancé. L'eau chaude coulait dans l'évier et attendait de pouvoir être salie par couverts et assiettes.

L'ironie du sort était que tout était de la faute de Perle. C'était à cause d'elle que la journée de Louis prenait un mauvais chemin mais que pouvait-elle faire ? Elle ne pouvait pas dire "Oui" alors qu'elle ne connaissait rien de son fiancé. Et voudrait-elle vraiment s'unir à lui sans connaître aucune autre personne ? Cela était impensable pour elle.

Son frère, désireux de ne pas laisser s'installer cette sensation de lourdeur, se pencha vers Louis pour lui parler à voix basse.

"Ne laisse pas cette conversation gâcher ta journée. Profite de mon absence pour faire vraiment connaissance avec Perle car d'après ce que j'ai pu voir…tu ne la laisses pas indifférente."

Le jeune homme se leva pour rejoindre sa sœur et la poussa de l'évier.

"Laisse ça, je terminerai. Après tout, tu as préparé le petit déjeuné."

Alors qu'elle allait répliquer, son frère l'envoya balader en lui suggérant gentiment d'aller bronzer un petit peu. Il lui trouvait encore une mine pâlotte. Tout en soupirant, la jeune fille sortit non sans avoir jeté un coup d'œil vers Louis qui n'avait toujours pas bougé. Son frère avait déjà installé les chaises longues sur leur partie de plage privée, aussi eut-elle juste à prendre un essuie de plage et de la crème solaire.
S'asseyant sur la chaise, la jeune fille se mit à regarder tristement l'océan tout en s'enduisant les bras de protection solaire.

*J'aurai préféré rester à la Nouvelle-Orléans…*

Vint ensuite le top et le short qui disparurent pour laisser la place à la crème solaire. Le dos fut la partie la plus délicate mais elle devrait faire avec. Ce n'était pas qu'il y avait foule sur la plage. Perle s'alongea sur le ventre et pour un bronzage parfait, elle détacha les attaches de son bikini. Sa tête vint se cacher entre ses bras et ses paupières se firent lourdes. Les rayons du soleil iradiait la plage d'une chaleur somnolente.

Alors que Perle avait choisi d'aller bronzer sur la plage, Louis décida de s'isoler pour réfléchir à sa conversation avec sa mère, enfin il la considerait davantage comme une génitrice que comme une mère. Elle n'avait jamais véritablement agi comme telle avec lui. Il en venait même à se demander si elle était dotée de ce fameux instinct maternel dont toutes les mères étaient si fières. La sienne aurait été capable de le mettre en bouteille pour le revendre de toute façon. Il jugeait que cela aurait été du gaspillage de l'en doter.

*Elle m'énerve, elle a vraiment le don pour me casser les pieds cette mégère narcissique.*

Louis aurait bien passe du temps avec Perle mais il était trop préoccupé pour le moment. Avec du recul, il réalisait que l'appel de sa mère n'avait peut-être pas été vide de sens. Normalement, elle n'aurait pas eu a être impatiente d'avoir des nouvelles de la situation de son mariage. Après tout, il n'aurait lieu que dans un an, s'il avait lieu bien entendu. Il se leva alors de table, salua Nate et partit en direction d'un palmier sous lequel s'abriter. La belle Perle a portée de sa vue, il avait l'occasion de méditer sur son avenir qui lui apparaissait alors bien flou.

*Depuis qu'il est arrivé, je n'arrive même plus à me détendre…*

Louis était assis contre le tronc d'un palmier dont les feuilles l'abritaient du soleil. Bercé par le son des vagues venues s'échouer sur le rivage, il scrutait l'horizon d'un air absent. Depuis son enfance, on lui avait mis en tête qu'il épouserait Perle Dumas quand il serait grand. Maintenant qu'il approchait de la date de ce moment tant attendu, il se mettait à douter pour la première fois. C'était l'appel de Cecilia Emmerson qui le faisait se remettre en question.

*Et si mes sentiments n'étaient qu'une illusion qu'ils étaient parvenus à mettre dans ma tête?*

Cette idée le terrifia. Louis ne pouvait supporter un tel fait, se révéler être le pantin de ses parents était bien l'une des pires choses à pouvoir lui arriver d'après lui. Le jeune homme passa une main dans ses cheveux et tenta de remettre ses idées en place.

"N'empêche que ma mère qui m'appelle, c'est quand même pas net. Cette garce est parvenue à me faire douter de mon amour pour Perle. Pourquoi cet appel?"

Sa mère n'avait que deux intérêts dans la vie : la popularité et l'argent. Pour la popularité, il est vrai qu'un tel mariage serait un plus mais pas de là à le presser. Ne restait plus alors que l'argent mais les Emmerson étaient loin d'en manquer. Quoique...

Comprenant qu'elle n'arriverait pas à se détendre, Perle releva sa tête pour examiner les alentours. Elle qui s'était attendu à se retrouver seule, découvrit avec étonnement son fiancé non loin d'elle. Etonnée, elle se demanda alors pourquoi celui-ci ne l'avait pas rejoint. Mais en prenant le temps de l'observer, elle put constater combien il était préoccupé. Diverses émotions transparaissaient sur son visage. L'ennui, l'incompréhension, et la peur. Cela troublait la jeune fille, elle qui l'avait toujours vu maître de ses émotions.
Elle décida alors de le rejoindre mais avant, elle rattacha son haut de bikini et entreprit de se rhabiller et de rouler sa serviette.

Lentement, elle remonta à lui et s'assit à ses côtés. Louis, absorbé par ses pensées, ne remarquait même pas sa présence.

*Comment se fait-il qu'un simple coup de téléphone de sa mère le mette à ce point dans cet état? Ou réaliserait-il enfin qu'il a été manipulé par ses parents ?*

Mine de rien, Perle ressentit de la peine pour lui. La jeune fille se permit alors de lui caresser la joue du revers de ses doigts avant d'y déposer un léger baiser.

*A quoi pensaient nos parents lorsqu'ils ont conclu ce marché…Surtout en nous élevant si loin l'un de l'autre…Aurai-je eu des sentiments différents à son égard aujourd'hui ?*

La jeune fille se mit alors à regarder pensivement Louis. Depuis son arrivée, elle ne lui avait laissé aucune chance, s'étant rebellé comme elle le faisait lorsque quelque chose ne lui plaisait pas. Mais si, d'un autre point de vue, la situation aurait été différente. Si elle avait rencontré Louis dans une fête, serait-elle sorti avec ? Il était fort à parier que oui…du moins, fallait-il que le jeune homme ait réussi à capter son attention.

Lorsque Perle déposa un baiser sur la joue de Louis, ce dernier se mît à sourire de façon un peu timide, comme un idiot en somme. Si Chuck avait été présent pour assister à cela, il aurait bien ri. Cependant, Louis ne lui en aurait pas voulu pour autant, ils étaient amis depuis des années et avaient pour jeu commun de rire l'un de l'autre dès que l'occasion s'y prêtait.

"Dis-moi, Perle, je me demandais un truc. Tu accepterais d'épouser un homme sans le sou?"

Louis avait posé là une drôle de question, par simple curiosité. Si les Emmerson venaient à perdre leur immense fortune, il lui suffirait de passer quelques temps à Las Vegas. Il s'était d'ailleurs déjà fait un nom là-bas. Il y avait passé plusieurs week-ends avec son ami et de fausses cartes d'identité. Alors que Chuck était plus chanceux avec les filles qu'au jeu, Louis avait une varraka extraordinaire. Mais tout ne résidait pas dans la chance. La capacité du jeune homme à bluffer était un atout majeur à sa fortune.

"L'appel de ma mère m'a fait réfléchir. Pour mes parents, notre mariage a toujours été une question d'argent..."

Louis se mît à enrouler une mèche de cheveux de Perle autour de son index. Il aimait bien jouer avec la chevelure soyeuse de sa fiancée.

Tout en regardant les doigts de Louis enrouler et dérouler une mèche de cheveux autour de son index, Perle se mit à réfléchir à la manière de lui répondre. Le jeune homme lui avait signalé qu'il n'aimait pas que l'on tourne autour du pot, pourtant, lui répondre un simple "Oui" ne suffirait pas. Elle devait s'expliquer.

"Tu m'aurais demandé ça il y'a quelques années, je t'aurai répondu "Non" mais aujourd'hui ou plutôt depuis que j'ai compris que l'argent n'était pas si important pour moi, je te répondrai "Oui". Peu importe que la personne que j'aime ait de l'argent ou pas. Mon amour pour lui restera pareil. Je ne sors pas avec le portefeuille mais plutôt la personne."

La jeune femme se rapprocha quelque peu de Louis et se mit à caresser du bout de l'index le dos de sa main droite.

"Et toi ? Pourrais-tu accepter d'épouser une femme ayant une plus grosse fortune que la tienne ? Accepterais-tu qu'elle t'aide ou laisserais-tu ta fierté prendre le dessus et refuser cette aide ?"

Cette question n'était pas anodine pour Perle. La jeune fille connaissait parfaitement l'étendue de son compte ainsi que le capital qu'obtiendrait son futur époux. Celui-ci était plus que conséquent. Mais pourtant, cela laissait indifférente la jeune fille. A douze ans, celle-ci possédait déjà plus que son frère aîné par le simple fait d'avoir été l'héritière d'une personne externe à sa propre famille.

Aussi légèrement qu'une plume, la jeune fille fit remonter son index sur l'avant-bras du jeune homme. Elle avait pour mauvaise habitude de ne jamais rester tranquille et qui plus est, elle adorait toucher.

"Penses-tu que tes parents soient à ce point en difficulté pour te presser ainsi?"

Sans le vouloir, la jeune fille se mit à s'inquiéter. Allait-il dès lors la presser pour qu'elle lui donne sa réponse ? Se connaissant, elle serait prête à se sacrifier pour l'aider. Il en allait ainsi avec ses proches. Peu importe la situation dans laquelle se trouvaient ses amis, Perle trouvait toujours un moyen de les aider. Seulement ici, la situation était quelque peu différente.

Louis haussa les épaules à la première question de Perle. Cette idée-là ne lui était jamais venue à l'esprit.

"Personnellement, ça m'est égal. Il en faut bien un des deux qui soit plus riche que l'autre si je puis me permettre. Je n'ai pas en tête la mentalité machiste qui décrète que l'homme doit être plus riche que la femme. Ma fortune personnelle, non pas celle de mes parents, n'est pas très étendue car je dépense beaucoup mais comme je sais comment gagner de l'argent très rapidement, ce n'est pas un problème."

En effet, Louis faisait beaucoup circuler sa fortune. Achats de véhicules, résidences secondaires, fêtes luxueuses, vêtements de très grandes marques, etc. Le jeune homme avait pour habitude de faire des dons à des associations pour lesquelles sa mère ne daignait pas apporter le moindre regard.

"Que mon épouse m'aide financièrement? Roh, j'aurais l'impression d'être un gigolo."

Il se mit à rire en projetant cette image en tête.

"Je ne me moque pas de ta question, rassure-toi. J'estime être suffisamment indépendant financièrement pour demander de l'aide. De toute façon, la pauvreté ne me fait pas peur."

Quand à la question de ses parents, Louis préférait réfléchir encore sur la question avant de se faire une véritable opinion sur ce sujet quelque peu épineux.